Un siècle de discriminations 1912-2012

En 2012 des centaines de milliers de Français enfermés dans la catégorie des « gens du voyage » figurent parmi les citoyens les plus discriminés de notre pays : ils restent soumis à un statut d’exception, dérogatoire au droit commun et à l’unicité de notre République.
Ce régime discriminatoire prend sa source dans la loi promulguée en 1912 sur « l’exercice des professions ambulantes et la circulation des nomades ». Cette logique administrative, impulsée par la loi de 1912, entraînera notamment un épisode sombre de notre histoire contemporaine avec l’internement des nomades et des Tsiganes par l’administration française de 1940 à 1946.
Confinées dans un statut qui n’évoluera que timidement en 1969, ces populations, aujourd’hui identifiées comme « gens du voyage », une appellation qui n’a d’ailleurs pas de singulier, subissent depuis cent ans  un traitement discriminatoire dans le droit et les politiques publiques. Les carnets anthropométriques instaurés en 1912 ont été remplacés par les carnets et livrets de circulations institués par la loi de 1969. A travers ces documents, différents de ceux qui servent à identifier les autres citoyens français, les « voyageurs » doivent se plier à un contrôle assimilable à un régime de « liberté surveillée ».
La confusion entretenue à tous niveaux entre catégorie administrative et communauté est aujourd’hui encore l’une des principales causes de la mise à l’écart des « gens du voyage » du débat public. C’est bien la construction, l’utilisation sélective de la catégorie « gens du voyage », et en particulier l’entretien d’un flou sémantique sur la nature de cette catégorie, qui contribuent à renforcer des représentations stéréotypées, disqualifiant continuellement les « gens du voyage » dans les sphères publiques, privées et médiatiques. Rien de surprenant alors qu’une majorité de Français considère que les « gens du voyage » constituent un groupe à part dans la société et continue à les traiter avec méfiance.
Un siècle  après la loi de 1912 et plus de 40 ans après celle de 1969, il est temps de réinterroger en profondeur les fondements et les conséquences actuelles d’une législation d’exception. Le collectif d’associations, d’historiens et de citoyens, constitué en 2010, pour la commémoration de l’internement des Tsiganes pendant la Seconde Guerre mondiale mène aujourd’hui une campagne d’information sur le statut discriminatoire des « gens du voyage » toujours en vigueur aujourd’hui.
Plus de 40 ans après la promulgation de la loi de 1969, les associations représentatives des Voyageurs et les associations de défense de leurs droits restent fermement  déterminées à lutter pour un plein accès au droit commun et à une citoyenneté à part entière.

CONTACT : voyageurscitoyens@gmail.com